Pour une croissance organique volontariste

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La période, que nous vivons actuellement, a au moins une vertu ; elle nous donne l’occasion de faire un temps d’introspection. A un moment ou les échanges et voyages se raréfient, il n’est pas vain de penser et d’anticiper la façon dont nous pourrons sortir renforcer de cette pandémie.

Comment transformer cette catastrophe en opportunité, ou plus simplement exprimé comment retrouver ou améliorer les niveaux d’activité pré-Covid19 ?

Les dirigeants, hôteliers, investisseurs que je rencontre lors de mes missions d’accompagnement en entreprises s’interrogent et me questionnent sur le plus sûr et le plus rapide moyen de regagner de la performance économique.

Je n’en connais qu’un : construire une stratégie commerciale solide. Bien sûr, cette recommandation annoncée de la sorte parait pour le moins simpliste. C’est pour cela qu’il convient de l’enrichir de principes intangibles.

« Penser contre soi-même », c’est considérer que la recherche de la vérité est plus désirable que la conviction…. Voilà le premier principe. Cet inconfort intellectuel permet d’intégrer une dimension qui n’est apparemment pas évidente lorsque l’on bâtit son futur commercial : le plus important est avant tout la destination. Celle-ci prime sur l’établissement. Le choix du voyageur se porte d’abord sur la destination de son séjour, avant de choisir l’établissement qui l’accueillera. C’est la raison pour laquelle une addition des forces vives de la destination (hôteliers, commerçants, offices de tourisme, centres de congrès, etc …) est indispensable pour envisager la prospection et le développement d’un marché défini. …. Seul, on va plus vite….ensemble, on va plus loin. Pénétrer un marché prend du temps, et coûte cher…. Décider de le faire à plusieurs est un gage de succès… Les moyens mis à disposition sont de fait plus important, et l’effet sur les prescripteurs ciblés est garanti.

J’ai sur ce sujet une expérience réussie. En effet, mes treize années à Cannes m’ont confortées dans cette stratégie. Convaincre les forces économiques locales n’a pas été la chose la plus aisée, mais une fois passé cette étape, la valeur ajoutée créée le fût au bénéfice de tous.

« Eviter toute dépendance », c’est veiller à ce que le business indirect, celui provenant des OTA (online travel agencies) et autres distributeurs ne soit jamais la part essentielle des revenus. La digitalisation des ventes a été une aubaine pour les hôteliers que nous sommes… elle a permis à bon nombre d’indépendants de se rendre visibles sur les marchés lointains, et ainsi de pouvoir développer leur chiffre d’affaires. Qui pourrait s’en plaindre ? Toutefois cette avancée présente deux dangers majeurs : le premier serait la tendance naturelle que certains pourraient avoir à sous-traiter ou déléguer de façon presque inconsciente la commercialisation et la croissance de leur activité. Peu d’obligations, pas de contraintes apparentes, la situation parait confortable. Peut-être l’est-elle à très court terme, mais comment garantir la pérennité de son entreprise lorsque les agences en lignes que sont Booking, Opodo, Expedia, Hotels.com, etc …représentent l’essentiel des revenus. Le second danger identifié à cette « addiction » tient dans le futur que je perçois pour les OTA….Conscientes de leur forces et de leur poids, elles ne tarderont pas à se comporter comme les tour-opérateurs l’ont fait il y a maintenant une dizaine d’années ….. Influencer fortement, voire s’immiscer dans la stratégie pricing des hôteliers dépendants, au motif de les aider à la vente. N’oublions jamais que notre stratégie tarifaire est pensée pour préserver et améliorer nos marges……….. la vision des OTA diffère ; elles recherchent le volume considérant que leur commission sur vente est immuable. Mon vécu dans les métiers de l’hospitalité m’oblige à recommander une grande prudence dans le choix des alliances entre l’hôtelier et les distributeurs ; beaucoup se sont révélées destructrices de valeur.

 

N’oublions jamais que notre stratégie tarifaire est pensée pour préserver et améliorer nos marges.

« Choisir et piloter sa croissance », c’est s’assurer des débouchés pérennes en maitrisant son fonds de commerce. Choisir plutôt que subir, tel est l’enjeu principal d’une stratégie commerciale volontariste. Pour cela nul besoin de vouloir toucher le plus grand nombre de marchés, mais plutôt de porter ses moyens, ses efforts et son énergie sur les quelques segments que l’on imagine les plus porteurs et dont on peut espérer un ROI rapide. Aussi souvent que possible, j’invite les hôteliers / restaurateurs qui me sollicitent à bâtir un plan de commercialisation dans lequel ils seront acteurs. Construire une relation de proximité avec les prospects, et les prescripteurs qui permettra de séduire les clients qui feront l’identité de l’établissement. J’ai constaté, plus que de raison, que l’hôtelier avait « la prospection commerciale honteuse », qu’il associait souvent cette démarche à de la retape…. Je m’efforce lors de cet exercice à l’inciter à préparer avec enthousiasme des arguments et des offres prix/produit cohérentes et susceptibles d’enchanter le client potentiel. Ce travail nécessite une réflexion préalable, que je résume par la question suivante : Quels sont les points ou atouts différenciants entre vôtre hôtel et la concurrence…. Ce que les américains appellent USP (unique selling points) ? Les réponses à cette question se trouvent souvent dans l’ADN de service et d’accueil, dans le soin et la proximité que l’on ambitionne de créer pour son établissement. Cette étape maitrisée, et les segments de marchés parfaitement identifiés, il ne reste plus qu’à aller à la rencontre du futur client qui deviendra un fidèle ambassadeur.

Chacun aura bien saisi la primauté du business direct (relation directe entre l’opérateur et le client) sur le business indirect (B to B)…J’entends souvent l’argument selon lequel le chiffre d’affaires apporté par la distribution est plus rentable que les revenus générés par une commercialisation classique…. J’invite tous ceux qui sont sensibles à cet argument à suivre sur une période donnée le coût que représente les commissions sur vente, et à imaginer comment cette dépense pourrait être utilisée pour pénétrer les marchés choisis.