Peut-on encore trouver aujourd’hui une entreprise qui n’a pas sa charte des valeurs ? Rares sont celles qui ne brandissent pas, tel un étendard, les engagements qu’elles se sont prescrites.
C’est vivre dans son époque que de pouvoir exhiber les vertus auxquelles on essaie de croire.
A la lecture de certaines de ces chartes, mon esprit chagrin y voit bien souvent de l’insincérité . Pour preuve, la façon dont celles-ci sont élaborées. Elles le sont trop souvent dans l’entre-soi d’un cénacle de dirigeants/managers qui fantasment ou idéalisent les valeurs qui veulent imposer à leurs équipes, mais qu’ils ont bien du mal à respecter eux-mêmes. Une adhésion à des valeurs partagées ne peut se faire au travers d’une posture jupitérienne.
Un noble exercice comme celui-là ne peut fonctionner selon le principe top/down, mais plutôt au travers d’un mouvement bottom/up.
A y regarder de très près, ce sont toujours les mêmes items qui sont mis en avant. Citons-en quelques uns : l’abnégation, le respect, la confiance, l’esprit d’équipe, la solidarité, etc… je pourrai continuer cette énumération encore longtemps.
La seule valeur qui vaille, n’est que très rarement revendiquée, et donc très souvent ignorée. Et pourtant c’est la seule qui puisse garantir à la fois cohésion, performance et pérennité.
Chacun aura compris que la seule valeur qui fait sens, c’est la loyauté : contrairement à ce qui est souvent dit, la loyauté n’est pas un sentiment, mais une caractéristique qui émerge naturellement lorsqu’on évolue dans un écosystème qui favorise l’épanouissement de l’individu.
La loyauté en entreprise obéit au principe de réciprocité. Le devoir de loyauté se fonde sur l’idée que le couple employeur/employé doit pouvoir avoir foi en l’autre, dans l’intérêt de l’entreprise.
Difficile me direz-vous de rencontrer quelqu’un en entreprise qui ne se présente pas comme totalement loyal envers sa hiérarchie, ses collègues, ou ses subordonnés. Là est le problème : chacun à sa propre interprétation de la loyauté.
La loyauté est toujours exigée pour les autres, mais rarement appliquée à soi-même. Pourtant, la clé du succès est précisément dans la probité et la rectitude qui sont les corollaires de la loyauté.
La couardise, la pusillanimité, la paresse, les intérêts personnels liés à la carrière ou la cupidité sont les principales caractéristiques d’une personne déloyale à son entreprise.
Pas question ici d’idéaliser l’individu parfait, car je sais qu’il n’existe pas. Mais chacun aura bien compris que tout est une question de cursus ; les convenances personnelles ou le confort individuel ne doivent pas primer sur les enjeux de l’entreprise. Ceux qui ont intégrés cette dimension morale ont toujours une trajectoire professionnelle assurée, et positive.
Parce que sincèrement convaincu de la valeur ajoutée et du sens que peut apporter une charte des valeurs, j’avais décidé en 2005, alors directeur général d’une entreprise cotée, de solliciter neuf collaborateurs, en majorité des front-liners, pour une mission de réflexion , et de construction d’une charte susceptible de devenir le bréviaire de l’entreprise.
Sans surprise, l’équipe projet chargée de mener à bien cet exercice de management, mettait tout en haut des valeurs à prôner, et à défendre, la loyauté.
Une fois achevée, l’intégralité des salariés de l’entreprise se reconnaissaient dans ce que leurs pairs avaient identifiés comme impératif absolu à l’atteinte des objectifs de l’entreprise.
Au risque de paraître présomptueux, cette expérience fût couronnée de succès. Le temps a passé, mais aujourd’hui encore, je crois que cette charte sert encore de boussole aux collaborateurs de cette belle entreprise.
Nulle ambition ici pour moi, de faire un cours de morale, mais plutôt de partager une expérience bâtie sur quelques décennies de vie en entreprise.
Je m’intéresse depuis longtemps maintenant, à la performance. J’essaie de comprendre ce qui différencie les entreprises qui réussissent des autres.
Mon constat est simple, et sans appel ; Les entreprises qui gagnent sont celles qui ont mis la loyauté au coeur de leur stratégie.