Le verdict du Tribunal de commerce de Nanterre est tombé le 21 juin ; il est sans appel. L’offre retenue valide la fermeture de 130 restaurants, et le licenciement d’environ 1500 salariés. Fermez le ban.
Qu’est-il arrivé à cette marque iconique, plébiscitée par tant de français, née pendant les Trente Glorieuses en 1961 ?
La covid, l’inflation des denrées alimentaires, et les tensions sur le marché de l’emploi sont passées par là, diront certains. Arguments faciles, et courts. Toujours la même logorrhée de la part de ceux qui refusent de regarder la réalité dans les yeux.
En vérité, la responsabilité pleine et entière en revient à l’actionnariat de l’entreprise. Pas moins de 5 fonds d’investissements successifs ont eu le contrôle capitalistique de Courtepaille en 20 ans. Un record mondial pour une entreprise de restauration.
Le métier de restaurateur est très différent de celui de financier, leurs intérêts ne sont pas alignés. La restauration répond à une logique artisanale et de proximité. Elle a besoin d’un engagement sur le long-terme. Les fonds d’investissements ont et imposent une stratégie court-terme, et rechignent bien souvent à faire les investissements nécessaires au renouvellement ou à l’entretien de l’outil de production.
L’acquisition par la formule LBO (Leveraged buy- out) n’est efficace que si la croissance est soutenue, permettant ainsi de couvrir la dette toujours importante dans ce type de modèle. Lorsque le secteur traverse une période de ralentissement (crise des gilets jaunes, covid, stagnation du pouvoir d’achat, autres, ) le modèle économique est bousculé. Alors, rien de plus simple pour les plus paresseux que de considérer la masse salariale et la qualité des produits servis comme variables d’ajustement. Si l’on ajoute à cela un recrutement aléatoire de certains dirigeants, on arrive au désastre tel qu’il est aujourd’hui.
C’est exactement ce qu’a vécu Courtepaille depuis de nombreuses années maintenant. Il n’y a pas de hasard. Le marché décide, et sanctionne.
Faire fi des fondamentaux que sont le produit et les équipes ne peut mener qu’à la catastrophe. Car c’est bien de cela dont il s’agit ; un drame social et un désastre pour l’économie de nos territoires. Dans bien des endroits, le restaurant est un lieu de vie pour la population locale, et un espace de sociabilité.
La restauration à table n’a plus la « côte ». Les investisseurs lui préfèrent maintenant le burger et la street- food, qui sont des offres de restauration urbaines ou périurbaines.
Non le secteur de la restauration n’est pas mort. Il y a encore de très belles expériences entrepreneuriales à y vivre. Il suffit pour cela, de respecter les basiques de la profession, et savoir se projeter dans le temps.
Victor Hugo aurait pu dire : « Ouvrez des restaurants, et vous fermerez des agences Pôle emploi »